Repères sur les apprentissages des élèves en termes d’argumentation

Les repères présentés sur cette page sont disponibles en fichier pdf : ici.

A. Les débats ecrits synchrones : quelles évolutions ?

Nous avons examiné les effets d’une séquence pédagogique qui combinait quatre débats en classe médiés par ordinateur et quatre activités réflexives (au collège et au lycée). Lors des activités réflexives, les élèves ont travaillé sur les normes de l’argumentation sur les questions socio-scentifiques (QSS) [lien hypertexte vers le fichier des normes], en s’appuyant sur les arguments qu’ils avaient formulés pendant les débats.

1 – Au collège : une progression sur plusieurs normes de l’argumentation

Dans leur premier débat, les élèves ont souvent tendance à s’exprimer par simple accord ou désaccord (dans un quart de leurs interventions). Au fil des débats, les résultats montrent des évolutions positives concernant les normes de justification et de prise en compte des arguments d’autrui (avec plus de réfutations et de nuances). Les trois normes spécifiques à l’argumentation sur des QSS (ouverture, complexité et incertitudes) sont également davantage mobilisées à la fin de l’intervention, bien que les incertitudes restent peu abordées. En revanche, seuls les élèves de 6e ont montré une amélioration en matière de réfutation, tandis que seuls les élèves de 4e ont progressé sur les dimensions du questionnement et de la prise en compte de l’ouverture des QSS.

2 – Au lycée : une argumentation de qualité dès le premier débat

Notre expérimentation révèle que les élèves, dès le premier débat, produisent une argumentation riche et de qualité sur les QSS. Chaque élève fait de nombreuses contributions, avec des mouvements argumentatifs diversifiés et un taux élevé de justifications. Les élèves abordent tous les aspects pertinents des QSS, ce qui indique qu’ils utilisent largement les normes génériques de l’argumentation, notamment les normes de justification et de considération des autres. Cependant, la norme de questionnement est moins utilisée, et les normes spécifiques aux QSS, comme la prise en compte des incertitudes et des acteurs, sont peu présentes.

Les résultats montrent des changements positifs, bien que limités, dans l’appropriation des normes génériques et spécifiques de l’argumentation sur les QSS. Dans le dernier débat, les élèves ont tendance à produire plus de justifications, à questionner davantage, à mieux prendre en compte les différents aspects des QSS et à inclure plus souvent dans leur argumentation les conditions dans lesquelles leurs idées sont valables.

B. Profils d’élèves en situation de débat

1 – Trois profils au collège et leurs évolutions

Au niveau du collège (6e et 4e), nous avons pu identifié trois profils d’élèves dans les débats. Un premier profil se dégage :

  • Le profil des « argumentateurs novices » : ils se contentent le plus souvent de dire s’ils sont d’accord ou non, sans développer davantage leur point de vue ; les résultats montrent que ces élèves progressent sur toutes les normes de l’argumentation au fil des débats.

Parmi les élèves qui argumentent mieux, deux profils se distinguent :

  • Le profil des « nuanceurs-questionneurs » : ce sont des élèves qui prennent souvent la parole, nuancent plus souvent leurs propos et questionnent plus fréquemment les idées formulées lors du débat ; au fil des débats, ces élèves justifient davantage leurs propos et prennent plus en compte la complexité des QSS.
  • Le profil des « développeurs-justificateurs » : ces élèves cherchent à approfondir les sujets, à expliquer leurs idées et à explorer la complexité des QSS ; au fil des débats, ces élèves nuancent et questionnent davantage les idées débattues.

2 – Trois profils au lycée et leurs évolutions

Après l’observation de quatre débats successifs au niveau du lycée (1ère et Terminale), trois profils d’élèves ont été identifiés en fonction de leur niveau initial en termes de justification : faible, moyen et élevé. Les élèves qui, initialement, justifient moins progressent sur cette norme de la justification au fil des débats. En revanche, les élèves ayant un niveau initial élevé ont tendance à questionner davantage les idées exprimées lors des débats, tout en maintenant leur taux de justifications.

C. Quel transfert à l’argumentation dans les écrits individuels ?

Dans quelle mesure les compétences argumentatives développées en contexte de débat sont-elles transférables à une production argumentative individuelle, notamment dans un écrit ?

Cette question permet de prolonger la réflexion entamée sur les effets des débats sur la qualité de l’argumentation, en s’intéressant à l’impact de leur pratique répétée sur les capacités argumentatives individuelles.

1 – Au collège : des progrès limités mais significatifs sur certains points

Les compétences argumentatives développées en situation de débats ne se transfèrent pas immédiatement à l’argumentation écrite individuelle. En effet, tous les élèves de 6e et de 4e, qu’ils aient ou non participé aux débats, montrent une légère amélioration dans la qualité de leur argumentation pour la plupart des normes évaluées, bien que cette progression ne soit généralement pas significative. Toutefois, concernant la justification, on constate une progression plus marquée chez les élèves de 6e que de 4e. De même, concernant la prise en compte d’autrui, une progression significative est constatée chez les élèves de 6e ainsi que chez ceux scolarisés en 6e et 4e dans les établissements relevant du Réseau d’Éducation Prioritaire (REP).

2 – Au lycée : un transfert partiel des compétences argumentatives du débat à l’écrit individuel

Les élèves, qui ont participé aux débats, ont tendance à fournir plus de justifications dans leurs écrits individuels, mais cette tendance n’est pas assez nette pour être considérée comme significative, ce qui suggère un transfert très partiel de l’appropriation de la norme de justification. Le nombre de dimensions des QSS considérées n’augmente pas dans les écrits individuels. Les incertitudes et les acteurs sont peu pris en compte dans les écrits individuels, reflétant les résultats observés dans les débats.